La fin des choses
Observer la fin des choses. L’impermanence est une des caractéristiques* du monde phénoménal : tout ce qui commence finit. Mais est-ce qu’on voit toujours la fin des choses ? Ou évite-t-on de la voir pour s’imaginer qu’elles continuent ? La contemplation des souvenirs et nostalgies du passé n’est-elle pas une tentative de prolonger ce qui est terminé ? Et la manie de commencer beaucoup de choses qui ne seront jamais finies, un moyen de ne pas être confronté à leur aboutissement ? Dans mon thème de Human Design*, comme j’ai la porte 53 (la porte des commencements) sans avoir la porte 42 (celle de la fin des cycles), je dois faire de gros efforts pour terminer ce que j’ai commencé. Quand j’y parviens enfin, je ressens une profonde satisfaction, mais elle est de courte durée, car beaucoup d’autres choses à finir attendent leur tour. Et si je ne m’y attelle pas tout de suite, j’ai tendance à commencer quelque chose de nouveau, ce qui ne fait qu’aggraver la situation. Cela semble insoluble et sans espoir.
L’attachement est également une manière de faire durer les choses, de les empêcher de finir. L’attachement aux objets, aux possessions matérielles, et la difficulté de s’en défaire, de les donner ou les jeter. L’attachement aux fichiers informatiques, et le souci de leur sauvegarde même lorsqu’ils sont devenus inutiles. L’attachement aux êtres, aux relations affectives et amicales qui semblent donner une continuité, une forme de sécurité à notre existence, et la crainte ou le refus des séparations, pour éviter le vide qui surgit quand on se retrouve seul. L’attachement à la vie, et l’oubli de sa durée limitée, qui cache la peur de la mort.
Certains prétendent qu’il y a quelque chose qui ne commence pas et ne finit pas, qui ne naît pas et ne meurt pas. Mais l’intemporalité, l’immortalité, l’éternité, ne sont-elles pas d’autres fantasmes, d’autres imaginaires pour éviter d’accepter la fin irrémédiable de toute chose.
Le printemps 2020 marque probablement le début de la fin de beaucoup de choses…
* Trois caractéristiques (pali : ti-lakkhana) : les trois caractéristiques de l’existence et de tous les phénomènes (selon le bouddhisme) sont anicca (l’impermanence), dukkha (l’insatisfaction) et anatta (l’impersonnalité).
* Human Design : le Human Design est un système complexe de connaissance de soi qui fait appel d’une part aux dernières découvertes de la génétique et de la physique quantique et d’autre part aux anciens enseignements de l’astrologie, du Yi Jing, du système indien des chakras et de l’arbre de vie de la kabbale. Pour plus de détails : https://human-design-en-francais.simdif.com.
1er mars 2016, Chiang Mai